Prenez soin de vous - Sophie Calle
Sophie Calle
Prenez soin de vous, 2007
Photographie couleur, texte, encadrement (x2)
113 x 140 cm (photographie) et 113 x 85 cm (texte)
Ed. 1/3 FR dont un set complet + 1 EA
Photos : © Tous droits réservés
Sophie Calle
Prenez soin de vous, 2007
Photographie couleur, texte, encadrement (x2)
113 x 140 cm (photographie) et 113 x 85 cm (texte)
Ed. 1/3 FR dont un set complet + 1 EA
Photos : © Tous droits réservés
Sophie Calle
Prenez soin de vous, 2007
Photographie couleur, texte, encadrement (x2)
113 x 140 cm (photographie) et 113 x 85 cm (texte)
Ed. 1/3 FR dont un set complet + 1 EA
Photos : © Tous droits réservés
À propos de l’œuvre: Cette œuvre est issue de l'installation Prenez soin de vous réalisée par l'artiste pour le Pavillon français de la Biennale de Venise en 2007. Sophie Calle, faisant souvent de sa vie amoureuse le point de départ de ses réalisations artistiques, débute ce travail après avoir reçu un mail de rupture. Elle le partage à 107 femmes et leur demande de le réinterpréter. Le mail est alors détourné et réécrit à leur manière et souvent par le prisme de leur métier (femme de lettres, journaliste, juriste...). ou selon d’autres approches plus singulières. Cette œuvre se présente en deux parties. Une photographie d’Alice Lenay prenant connaissance du mail, accompagnée dudit texte qu’elle a retranscrit en langage SMS. L’installation a fait l’objet de nombreuses expositions (Montréal, Paris, Londres, New York…) entre 2007 et 2016 et plus récemment à la galerie Perrotin en 2020. Les textes et photographies présentés ont également été réédités afin de créer un livre du même nom.
À propos de l’artiste : Née en 1953 à Paris, Sophie Calle est une artiste qui vit et travaille à Paris. Figure majeure de l’art contemporain français, elle est connue comme une photographe et vidéaste dont le travail, à la fois conceptuel et littéraire, déplace l’intime dans la sphère publique tout en se jouant des frontières en l’art et la vie privée. En effet, ses premières aventures artistiques consistaient en des performances qui avaient lieu dans son quotidien. C’est ainsi qu’en 1979, l’artiste a invité une vingtaine de personnes à dormir dans son lit et qu’en 1980, elle se décide à suivre un inconnu jusqu’à Venise. L'œuvre de Sophie Calle repose sur une puissance narrative convoquant les thèmes de l'absence, du manque et de la disparition, comme en témoigne la série Prenez soin de vous. En 2004, le Centre Pompidou lui consacre une rétrospective faisant d'elle une artiste incontournable de la scène contemporaine française. À la suite de celle-ci, Sophie Calle a été invitée à représenter la France en 2007 lors de la 52e Biennale de Venise, puis s’est fait connaître à travers le monde. En 2022, le Musée d’Orsay lui a consacré une exposition intitulée Les fantômes d’Orsay et son travail a été mis à l’honneur à l’Art Institute of Chicago aux Etats-Unis.
Avis de l’expert: Cette œuvre s’inscrit dans un des projets les plus salués de Sophie Calle et en représente tout à fait l’essence. Sa tendance à déplacer l’intime vers le public et confondre son art et sa vie transparaît tout à fait dans ce projet, proposant par la même occasion 107 autofictions de ruptures amoureuses dialoguant avec la sienne.
Texte d’origine :
Sophie,
Cela fait un moment que je veux vous écrire et répondre à votre dernier mail. En même temps, il me semblait préférable de vous parler et de dire ce que j’ai à vous dire de vive voix.
Mais du moins cela sera-t-il écrit.
Comme vous l’avez vu, j’allais mal tous ces derniers temps. Comme si je ne me retrouvais plus dans ma propre existence. Une sorte d’angoisse terrible, contre laquelle je ne peux pas grand-chose, sinon aller de l’avant pour tenter de la prendre de vitesse, comme j’ai toujours fait. Lorsque nous nous sommes rencontrés, vous aviez posé une condition : ne pas devenir la “quatrième”. J’ai tenu cet engagement : cela fait des mois que j’ai cessé de voir les “autres”, ne trouvant évidemment aucun moyen de les voir sans faire de vous l’une d’elles.
Je croyais que cela suffirait, que vous aime et que votre amour suffiraient pour que l’angoisse qui me pousse toujours à aller voir ailleurs et m’empêche à jamais d’être tranquille et sans doute simplement heureux et “généreux” se calmerait à votre contact et dans la certitude que l’amour que vous me portez était le plus bénéfique pour moi, le plus bénéfique que j’ai jamais connu, vous le savez. J’ai cru que L’I… serait un remède, mon “intranquillité” s’y dissolvant pour vous retrouver. Mais non. C’est même devenu encore pire, je ne peux même pas vous dire dans quel état je me sens en moi-même. Alors, cette semaine, j’ai commencé à rappeler les “autres”. Et je sais ce que cela veut dire pour moi et dans quel cycle cela va m’entraîner.
Je nous ai jamais menti et ce n’est pas aujourd’hui que je vais commencer.
Il y avait une autre règle que vous aviez posée au début de notre histoire : le jour où nous cesserions d’être amants, me voir ne serait plus envisageable pour vous. Vous savez comme cette contrainte ne peut que me paraître désastreuse, injuste (alors que vous voyez toujours B., R., …) et compréhensible (évidemment…) ; ainsi je ne pourrais jamais devenir votre ami.
Mais aujourd’hui, vous pouvez mesurer l’importance de ma décision au fait que je sois prêt à me plier à votre volonté, alors que ne plus vous voir ni vous parler ni saisir votre regard sur les choses et les êtres et votre douceur sur moi me manqueront infiniment.
Quoiqu’il arrive, sachez que je ne cesserai de vous aimer de cette manière qui fut la mienne dès que je vous ai connue et qui se prolongera en moi et, je le sais, ne mourra pas.
Mais aujourd’hui, ce serait la pire des mascarades que de maintenir une situation que vous savez aussi bien que moi devenue irrémédiable au regard même de cet amour que je vous porte et de celui que vous me portez et qui m’oblige encore à cette franchise envers vous, comme dernier gage de ce qui fut entre nous et restera unique.
J’aurais aimé que les choses tournent autrement.
Prenez soin de vous.
G.